Hôtellerie-restauration : pourquoi les salariés ne veulent pas revenir

« Je ne resterai pas, je m’en vais bientôt », voilà ce que nous glisse Momo, affable serveur dans une brasserie parisienne où nous avons nos habitudes.

Lui au moins est revenu, mais pas sa centaine de milliers de collègues. Nous nous sommes intéressés aux causes profondes de cette désaffection sans précédent. Des experts évoquent la crise de la Covid-19 qui aurait ouvert les yeux à ces premiers de corvée, lesquels ne voudraient plus travailler la nuit, ni travailler le week-end et souhaiteraient tous avoir la vie de monsieur ou madame-tout-le monde, où on va au boulot du lundi au vendredi de 9h à 17h.

Il est vrai que pendant près d’un an, serveurs, commis de cuisine, femmes de chambre, barmans, etc. sont restés bien au chaud à la maison, sous le régime du chômage partiel. Tant d’oisiveté payée laisse forcément des traces ; en tout cas, ça pousse à l’introspection.  Et comme personne ne peut garantir ce que l’on ramène d’un long voyage à l’intérieur de soi…

Démotivateurs extrinsèques

En discutant avec une poignée de ces salariés en désamour avec leur profession, nous avons entendu beaucoup parler de pénibilité, d’horaires atypiques, de bas salaires, etc.  A vrai dire, les serveurs ont été moins nombreux à évoquer la question de la rémunération.  Il y a cependant un point qui est revenu le plus souvent, et commun à tous les corps de métier de l’hôtellerie-restauration : le manque de considération de la part des employeurs. Ça donne ceci dans la bouche de Keye, la cinquantaine, employée comme femme de chambre dans une importante chaîne hôtelière : « on nous traite comme de la merde ! »

Le nœud du problème serait donc là ; le mésestime des salariés, corvéables à merci et qu’on pouvait remplacer au pied levé. Remarquons que beaucoup d’établissements ont vu la quasi-totalité de leurs salariés revenir, là où il y a d’autres qui sont incapables de tenir le niveau de service habituel, faute d’employés. Nous avons parlé aux patrons qui s’en sortent mieux, à chaque fois, sans leur donner le moindre indice, ils nous ont déclaré dans une belle unanimité « nous avons gardé le lien avec nos salariés pendant la crise, ils sont contents de travailler ici, du coup ils sont tous revenus ». Preuve, certes pas suffisante, mais fortement significative, que les employeurs du secteur CHR doivent réexaminer leurs pratiques managériales.

Câlinothérapie

Cette crise du recrutement ne sera pas durable, pour des raisons que nous détaillerons dans une autre publication. Mais à l’instar de ce qu’il s’est passé lors de la guéguerre chauffeurs de taxis contre VTC, les restaurateurs et hôteliers devront consacrer leurs heures de fermeture forcées à la lecture de deux livres : Du management au marketing des services de Benoît Meyronin et Charles Ditandy, et l’excellent Les employés d’abord, les clients ensuite du célèbre Vineet Nayar. La quintessence de ces deux ouvrages tient en un concept sur lequel nous aurons l’occasion de revenir, la symétrie des attentions.

Monde du travail

2 éléments de réflexions sur “Hôtellerie-restauration : pourquoi les salariés ne veulent pas revenir

  1. dupont on Répondre

    l’article suggère tout en douceur que les serveurs ont pris goût à une vie douce pendant le confinement, et essaie de culpabiliser des salariés qui ENFIN, osent exiger pour eux-mêmes et leur famille une vie normale. Cet article distille une certaine aigreur…
    En premier lieu, tous les serveurs ne sont pas restés à la maison: nous sommes des bosseurs, des vrais, et certains dont je fais partie, sont allés travailler dans la grande distribution.
    Par ailleurs, il est légitime de tout faire pour quitter un métier où les patrons traitent vraiment leurs employés comme des moins que rien . Je vous parle après 25 ans d’expérience. Comme dernier exemple, ma rupture conventionnelle signée bien après la fermeture de l’établissement ( car une rupture conv coûte moins cher qu’un licenciement éco) , effective depuis le 1er septembre , mais pas encore payée car la patronne estime qu’elle n’a pas d’argent et que je verrai bien quand je serai payée. Je suis à découvert , j’élève seule ma fille , je n’aurai pas de salaire en septembre pour vivre. Les ASSEDIC seront versées en octobre. Ma patronne s’en moque.
    JE QUITTE LA RESTAURATION ET CE MONDE DE MAFIEUX.
    Bien fait s’il n’y a plus assez de personnel pour se faire exploiter. Quand il n’y aura plus aucun serveur, ils se remettront peut-être en question .

    1. Wenites on Répondre

      Comme je vous comprends… Vous êtes certainement tombée sur des mauvais patrons. En tout cas, comme vous le dites, de nombreux autres secteurs ont besoin de travailleurs comme vous. Vous trouverez autre chose très vite.
      Bon courage

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